Chronique de Babs : Le système éducatif sénégalais perd le nord
Le coronavirus est-il en mutation au Sénégal au point de développer une souche virale qui a fini par inhiber ou créer un surmenage dans la tête des dirigeants du pays ? Voilà une question qui me taraude l’esprit depuis la décision prise,derechef, par le président Macky Sall de fermer tous les ordres d’enseignement du pays jusqu’à l’assouplissement dans la circulation des personnes et des biens. Un euphémisme politicien visant à camoufler un mauvais choix aux conséquences économiques suicidaires.
Un saut vers l’inconnu d’une population, d’abord gagnée par la peur d’attraper le virus puis poussée à « vivre avec le virus » ou plutôt à cohabiter avec le virus tout en continuant à lui couper sa chaîne de transmission.
Suite à la décision « d’assouplir le couvre-feu » prise par le président Macky Sall sous la « pression » de la rue occupée la nuit par quelques jeunes à Touba, la reprise des cours pour les classes d’examen a été fixée au 2 juin. Un tintamarre organisé à travers tout le pays pour crier à hue et à dia que le protocole sanitaire est prêt dans toutes les écoles et sur toute l’étendue du territoire. Et que le 2 juin passé, les cours allaient reprendre.
Des enseignants sont convoyés ou envoyés au front dans des conditions qui dépassent l’entendement. Faisant fi des mesures barrières, surtout de la distanciation, dans un milieu où leur travail consiste à former de la matière grise pour le pays, a étonnée. Le résultat est vite tombé. Des enseignants sont contrôlés positifs à la covid 19, une fois arrivés dans leurs lieux de service.
Un prétexte utilisé par les autorités pour reporter la reprise à une date ultérieure. Une aubaine saisie par ces dernières qui savaient que le respect du protocole sanitaire, une exigence ferme des syndicats des enseignants, n’était pas rempli, le report a été annoncé, en catimini, le 1er juin aux environs de minuit.
Trois semaines après, la date du 25 juin a été prise par le chef de l’Etat et annoncée par le ministre de l’Education nationale, le maître d’œuvre. Cette précipitation dans la décision de vouloir coût que coût organiser les examens, particulièrement du baccalauréat, avant septembre, obéit à un agenda tourné vers l’international.
Ce sésame qui, une fois en poche, permet aux enfants des grosses pontes de la république et de la bourgeoisie affairistes d’aller poursuivre leurs études dans des universités ou grandes écoles dans l’hexagone ou au pays de l’oncle Sam. Dans ces contrées inaccessibles aux fils des « badolos » ou pauvres sénégalais, l’année universitaire débute en septembre.
Eh bien, tous les sénégalais savent qu’en hivernage, les activités champêtres priment sur toute autre activité pour l’écrasante majorité et que les écoles, même dans les grandes villes, n’offrent pas les conditions nécessaires pour recevoir les élèves et leurs enseignants. Qui ose au Sénégal, en toute liberté, penser organiser des examens pendant le mois d’août ?
Une fois de plus, l’analyse du contexte montre que l’urgence pour les enfants d’une poignée de personnes influentes ou qui tiennent les rênes du pays dicte le calendrier des examens au détriment de l’intérêt national. Et pour maquiller ce forfait cousu de fil blanc, le spectre de l’année blanche a été vendu ou tenté de l’être dans l’opinion. Mais l’essentiel des parents d’élèves du Sénégal a fini de relever toutes les incohérences du ministre de l’Education nationale dans la gestion de cette année scolaire.
Pour avoir terminé le premier semestre de leur année scolaire, des enseignants ont fait des propositions réalistes pour sauver le système et préserver leur santé et celle de leurs élèves.
D’après Ibrahima Ngom, un spécialiste de l’Education à la retraite, il suffisait juste de reprendre les enseignements en fin septembre pour dérouler le reste des programmes pour tous les élèves, faire des compositions en fin décembre et les examens en début janvier. A la suite de cela, l’année scolaire 2020-2021 démarre aussitôt pour finir en juin. Les vacances de Pâques seront éliminées et le problème résolu.
Parfois, on se demande si la Covid 19 n’a pas développé, à l’insu des spécialistes de la santé au Sénégal, une souche locale qui a conduit au surmenage des dirigeants du système éducatif.
A mon avis, il faut juste admettre que dans la nouvelle gouvernance du pays de 2000 à maintenant, dans toutes les sphères, les intérêts de groupe priment, sans état d’âme, sur l’Intérêt national… Ceci jusqu’à quand ? «That’s the hard question ».
Chronique de Babs : Le système éducatif sénégalais perd le nord
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