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« Scandale au cœur de la République, Le dossier du COUD », PREMIÈRE PARTIE

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Votre site qui traite l’information de manière professionnelle a parcouru le livre « Scandale au cœur de la République, Le dossier du COUD » du journaliste Pape Alé Niang pour ses internautes qui n’ont pas pu se le procurer. C’est un livre de 155 pages réparties en trois parties. Voici la première partie dans sa version PDF, l’introduction ainsi que l’avant-propos. Les autres suivront. incha allah.

Préface
Pape Alé Niang m’a fait l’honneur de me demander de préfacer ce livre. Honneur que j’ai accepté, naturellement, avec un grand plaisir. J’ai suivi, avec intérêt, sa riche carrière de dix-neuf ans. Ses études universitaires sanctionnées par une maîtrise en Sociologie, il intègre l’École du Groupe Sud communication, l’Institut supérieur des Sciences de l’Information et de Communication (ISSIC). Nanti du diplôme supérieur en journalisme en 2000, il est recruté la même année par le Groupe Sud communication. Rappelons que c’est le 19 mars de cette année-là qu’intervient, dans notre pays, la première alternance par les urnes. Son recrutement par le Groupe Sud communication était déjà un signe du rôle majeur qu’il allait jouer par la suite, notamment en ayant les yeux rivés au quotidien sur le déroulement de la première comme de la seconde alternance. Il marquera de ses empreintes indélébiles — le qualificatif n’est pas trop fort — son passage à la Radio Sud FM. La revue de presse et l’émission Janoo bi qu’il animait alors, étaient largement suivies.
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Scandale au cœur de la République
En 2007, Pape, comme je l’appelle affectueusement, est recruté par la 2 STV, première chaîne de télévision privée au Sénégal. Il y anime des émissions de haute facture, notamment « Pile ou Face », « Décryptage », « La Grande Interview », « Le grand Reportage », « Ca me dit Mag ». De grandes émissions très suivies, et qui ont marqué l’espace audio-visuel sénégalais. Pas seulement d’ailleurs. Elles allaient aussi déranger, et devenaient même insupportables dans certains milieux. Elles étaient, en effet, de grands moments, des opportunités pour passer en revue et sans réserve la gouvernance du pays, qui n’est pas des plus exemplaires. Ici, Pape Alé assuma totalement et courageusement son rôle de journaliste, consistant prioritairement à informer, à sensibiliser et à éclairer les populations. Pape se fit remarquer en particulier par son attachement indéfectible à la bonne gouvernance, applicable notamment dans la gestion des finances publiques, conformément aux dispositions de la Directive de l’UÉMOA (n° 1/2009/CM/UÉMOA) portant Code de Transparence dans la gestion des finances publiques, transposée dans le droit interne sénégalais par la Loi n° 2012-22 du 27 décembre 2012. À cause de cette posture qui dérangeait de plus en plus, il quitta la 2 STV pour garder son indépendance et sa liberté de ton. Dans cette perspective, il mit en place le site d’information Dakarmatin. com et créa un espace, un rendez-vous régulier avec le peuple sénégalais. Ce rendez-vous très couru, c’est sa chronique du mercredi. À l’occasion, Pape dénonce vigoureusement le pillage organisé de nos maigres res
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Le dossier du COUD
sources et flétrit les comportements de nos dirigeants, aux antipodes des valeurs cardinales qui faisaient jadis la fierté de notre pays.
Pape Alé ne se contente pas seulement d’animer des émissions. Il est aussi porté vers l’investigation et c’est très heureux puisque, dans ce domaine-là, nous ne sommes vraiment pas gâtés. Dans notre pays, les scandales succèdent aux scandales et Pape Alé les traque, surtout quand il s’agit de gestion de nos maigres deniers publics. C’est ainsi que celle du l’ex-Directeur du COUD, Cheikh Oumar Hann, a particulièrement retenu son attention. Cette gestion, l’un des plus gros scandales de la gouvernance « vertueuse et sobre » du président-politicien, a déjà fait l’objet d’un dossier parmi 18 autres déposés auprès du Procureur de la République par l’OFNAC. Un silence lourd entoure tous ces dossiers, et de nombreux autres. En bon journaliste d’investigation, Pape a voulu en savoir bien plus. Les résultats de ses recherches ont été consignés dans ce livre, qui vient vraiment à son heure. Il nous édifie sur le pillage systématique de nos maigres ressources organisé par M. Hann et son entourage d’alors. Je ne rentrerai pas dans les détails. J’en laisse le soin aux lecteurs qui se feront une idée exacte de la gestion calamiteuse de ce M. Hann. Je signalerai seulement, à titre de hors-d’œuvre, qu’il s’est permis de recruter, en un seul acte, 400 jeunes d’une même localité. J’ajouterai que la caisse de la Mairie de Dakar (30 millions/mois) pour laquelle Khalifa Ababacar Sall a croupi en prison
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Scandale au cœur de la République
pendant 900 jours, est une naine par rapport à celle dont a eu à bénéficier M. Hann. Il recevait en effet, dans le cadre de cette caisse, 150 millions par 10 jours. Soit 450 millions/mois pour l’achat de légume. Le responsable APR, devenu contre toute attente ministre de la République, a eu à dépasser toutes les bornes, en achetant un kilogramme de haricot à 4500 francs CFA. Oui, un kilogramme de haricot à 4500 francs.
Le livre de Pape Alé est truffé d’exemples de cette sorte. Les lecteurs en auront le cœur net, quand ils finiront de le lire. Ils s’indigneront sûrement, au fur et à mesure de la lecture, que cette gestion scandaleuse soit restée jusqu’ici impunie, à l’image de nombreuses autres, dont les auteurs sont légion dans l’espace présidentiel. Pour ce qui me concerne, je félicite vivement Pape Alé et forme le vœu ardent que d’autres journalistes, s’inspirant de son exemple, émergent de l’espace médiatique.
Mody Niang,
Inspecteur de l’Enseignement
élémentaire à la retraite.
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« Et, s’il existe, en un endroit ignoré, un honnête homme capable de te gouverner et de t’aimer, ne le regrette pas. Il serait trop jaloux de sa dignité pour se mêler à la lutte fangeuse des partis, trop fier pour tenir de toi un mandat que tu n’accordes jamais qu’à l’audace cynique, à l’insulté et au mensonge. Je te l’ai dit, bon homme, rentre chez toi et fais la grève. »
La grève des électeurs — Octave MIRBEAU — 1888
« Détrônez tout imam dont vous voyez la fortune s’accroitre et confisquez l’ensemble de ses biens ; combattez-le et expulsez-le s’il s’entête et veillez bien à ce que l’imamat ne soit transformé en une royauté héréditaire où seuls les fils succèdent au père. »
Thierno Souleymane BAAL, fondateur de l’état théocratique — Fouta Toro — 18e siècle

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Introduction
« Les deux sont répréhensibles. Mais du corrupteur et du corrompu, lequel des deux est le plus coupable ? Le corrupteur qui est en position de force ? Ou le corrompu qui cède à la tentation ? » Nadia Van Hamme — Politologue belge
En matière d’arsenal de prévention et de répression contre la corruption, la concussion, la prévarication de nos ressources, l’enrichissement illicite, le Sénégal n’a rien à envier à aucun autre pays au monde.
Il compte en effet, un nombre conséquent d’organes de contrôle comme l’Inspection générale d’Etat (IGE), la Cour des Comptes, la Cour de Répression de l’Enrichissement illicite (CREI), la Cellule nationale de traitement des Informations financières (CENTIF), l’Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP), la
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Scandale au cœur de la République
Direction centrale des Marchés publics (DCMP) et le dernier né l’Office national de lutte contre la Fraude et la Corruption (OFNAC) dotés de pouvoirs qui devraient leur permettre, faute d’éradiquer la mal gouvernance — ce qui est une gageure — au moins de la faire reculer notablement.
Malheureusement tel n’est loin d’être le cas. Bien au contraire ! Les Sénégalais s’interrogent même sur l’utilité de cette pléthore d’institutions de contrôle et se demandent à quoi elles servent finalement.
Prônant une gouvernance « Sobre et vertueuse », le Président Macky Sall était très attendu sur ce terrain, la reddition des comptes étant de tous les temps, mais plus particulièrement à l’occasion de la campagne électorale de 2012, une exigence citoyenne. Rupture profondément souhaitée par le peuple dans la gestion des deniers publics, dans le prolongement des conclusions des Assises nationales auxquelles tous les candidats de l’opposition à l’élection présidentielle de 2012 avaient souscrit, y compris le candidat Sall, même si c’était sans trop d’enthousiasme. La trouvaille du Président nouvellement élu en 2012 a été l’Office national de lutte contre la Fraude et la Corruption (OFNAC).
Sa création avait suscité beaucoup d’espoirs. Mais une interrogation légitime subsistait toujours. L’OFNAC allait-il pouvoir contourner, pour être efficace et effi
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cient dans l’exercice de sa mission, les contraintes et obstacles érigés en permanence par le pouvoir politique sur le chemin des organes de contrôle ?
Si aujourd’hui, on doute de l’efficacité des organes de contrôle, la responsabilité majeure incombe aux politiques. Et, principalement, au président de la République. Chef d’Etat, chef de parti, ses partisans sont servis à satiété dans la gestion des affaires publiques. Et, leurs premiers reflexes consistent généralement à user et à abuser des deniers publics pour entretenir une clientèle politique afin de mieux asseoir leur pouvoir. Conséquence, épinglés en permanence par des rapports des corps de contrôle pour des fautes de gestion, ils sont sauvés par le tout puissant chef d’Etat, chef de parti. Normal diront certains : c’est le président de la République, qui, sous nos cieux, décide de tout : de la cible de la justice (qui doit être poursuivi ou non) même si, pour se dédouaner, il s’abrite sans état d’âme derrière la sacro-sainte indépendance de la justice.
Malheureusement, le nouveau-né qu’est l’OFNAC n’a pas, échappé au même sort qui était réservé aux autres organes de contrôle. Le dossier établi contre le DG du Centre des Œuvres universitaires de Dakar (COUD) dort dans les tiroirs de Dame justice. Les autorités épinglées pour faute lourde, proches du Président, bénéficient de promotions en lieu et place de sanctions. Une manière de narguer sans vergogne
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Scandale au cœur de la République
ceux qui ont cru en la fin de l’impunité dans notre pays, le Sénégal, par le seul fait qu’un nouveau pouvoir aux signes prometteurs s’était installé et pour lequel ils avaient voté

Première partie
Avant-propos

« Le temps de l’impunité est révolu… » Macky Sall
« Si l’injustice et la corruption ne
gangrénaient les sociétés africaines,
l’Afrique serait le continent le plus puissant. »
Jean-Baptiste Gbamon Zebelanou Etudiant Guinée-Conakry Elu, le 25 mars 2012 quatrième président de la République du Sénégal, Macky Sall s’est voulu l’apôtre de la bonne gouvernance. Déjà, lors d’une campagne palpitante, son discours a sans cesse été rythmé par des slogans du genre « La patrie avant le parti », « une gouvernance sobre et vertueuse ». A l’occasion de son premier discours à la Nation, le 03 Avril 2012, il déclara solennellement : « S’agissant de la gouvernance économique, je serai toujours
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guidé par le souci de transparence et de responsabilité dans la gestion vertueuse des affaires publiques. Je mets à ma charge l’obligation de dresser les comptes de la Nation et d’éclairer l’opinion sur l’état des lieux. Je compte restituer aux organes de vérification et de contrôle de l’Etat la plénitude de leurs attributions. » Très inspiré, il poursuivit « L’assainissement de l’environnement des affaires et la lutte contre la corruption et la concussion me tiennent particulièrement à cœur. »
D’un ton ferme, Macky Sall prévenait sans équivoque ses collaborateurs et les membres de sa coalition en ces termes : « A tous ceux qui assument une part de responsabilité dans la gestion des deniers publics, je tiens à préciser que je ne protégerai personne. Je dis bien, personne ! » Il engageait ensuite « fermement le gouvernement à ne point déroger à cette règle. » Un discours qui avait suscité à l’époque bien des espoirs.
Ne s’arrêtant pas en si bon chemin dans sa croisade contre la mal gouvernance, le Président, dans une interview accordée au magazine hebdomadaire « Jeune Afrique », persiste et signe. « La rupture n’est pas un slogan. C’est un comportement, celui que les dirigeants de ce pays doivent adopter. Humilité, sobriété et rigueur doivent régir notre action politique. Je vous assure qu’il s’agit bien là d’une rupture, profonde avec les pratiques en vigueur sous mon prédécesseur. » répond-il au journaliste, avant d’asséner avec vigueur « Avec moi, tout va changer… Les Sénégalais ont réclamé une gouvernance plus vertueuse, plus sobre,
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plus transparente. Nous avons l’obligation de rendre des comptes… Personne n’est au-dessus des lois. Le temps de l’impunité est révolu. » 1
Alliant donc la parole à l’acte, pour prouver ses bonnes intentions, le lundi 21 mai 2012, le Président Macky Sall annonça la mise sur pied d’un Office national anti-corruption (OFNAC), qui a pour mission de prévenir et de lutter contre la corruption et les infractions assimilées dans le but de renforcer le dispositif stratégique de la gouvernance publique. Au cours d’une rencontre avec les inspecteurs généraux d’Etat et les membres du gouvernement, le chef de l’Etat déclare de manière solennelle : « l’OFNAC qui va être bientôt créé sera une autorité indépendante dont la mission consistera à la prévention et la lutte contre la corruption et les infractions connexes. L’OFNAC sera chargé de promouvoir l’intégrité et la probité dans la gouvernance publique. Cette structure sera dotée d’importants pouvoirs notamment celui d’auto-saisine pour toute enquête ou investigation qu’il jugera utile… »2. Avec la même verve, le Président Macky Sall ajoute : « D’ailleurs l’OFNAC va aussi publier ses rapports. »
1. 24 juin 2012 — Sénégal – Macky Sall : « Avec moi, tout va changer »… chef de l’État se dévoile dans sa première grande interview accordée à Jeune Afrique. 175 484 2. 21 mai 2012 — Le chef de l’Etat, Macky Sall, rencontre les inspecteurs généraux d’Etat et les membres du gouvernement et annonce la mise sur pied d’un Office national anti-corruption (OFNAC).
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Dans la même foulée, le président de la République annonce la création d’une structure pour traquer les biens mal acquis partout où besoin sera. « Nous allons créer bientôt une commission nationale de restitution des biens et de recouvrement des avoirs mal acquis qui va rechercher partout où besoin sera » martela-t-il. En réalité, il n’avait fait qu’exhumer la Cour de Répression de l’Enrichissement illicite (C R E I), mise en veilleuse par l’ancien Président Abdou Diouf depuis 1989. Qu’à cela ne tienne, le Président Macky Sall se présentait volontier comme le chantre de la bonne gouvernance, qu’il voulait symboliser aux yeux des Sénégalais.
C’est le 19 décembre 2012 que l’Assemblée nationale va jouer sa partition dans cette croisade contre la mal gouvernance en votant le projet de loi portant création de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC). Un texte d’une importance capitale, un outil pour lutter contre la corruption, les détournements de l’argent public et les fraudes. Macky Sall, président de la République, venait ainsi d’honorer une de ses promesses de campagne, du moins en apparence.
Feu Mouhamadou Mbodj, coordonnateur du Forum civil, une ONG spécialisée dans la lutte contre la corruption au Sénégal, n’a pas manqué d’exprimer à l’époque sur les ondes de Radio France Internationale (RFI) sa satisfaction après la création de l’OFNAC. « C’est une réforme audacieuse du chef de l’Etat.

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Une véritable révolution » déclarait-il. Et de préciser «…Contrairement à son prédécesseur, la Commission nationale de lutte contre la non-transparence, ce nouvel organe ne fera pas que donner des avis ou publier des rapports destinés à rester dans les tiroirs, mais il dispose désormais du pouvoir d’auto-saisine et d’investigation. Il peut également saisir la justice. » Une avancée incontestable. Macky Sall avait de quoi pavoiser. En tout cas jusqu’à preuve du contraire.

1. L’OFNAC, la trouvaille de Macky SALL
« La loyauté n’est qu’une chimère dans les pays où la corruption fait rage. » Mofaddel Abderrahim Maroc « J’ai créé l’OFNAC, autorité administrative indépendante dotée d’importants pouvoirs d’investigations, d’auto-saisine et de saisie directe de la justice en vue de renforcer le cadre institutionnel de lutte contre la fraude et la corruption » clamait partout le Président Macky Sall. Sur un ton menaçant il ajoutait, lors de l’université hivernale de l’APR en décembre 2012, en direction de ses camarades : « L’OFNAC, c’est pour nous. » Une manière de dire « La CREI va s’occuper des 25 dignitaires du régime de WADE révélés par le procureur spécial Alioune NDAO. »
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Règlement de compte politique ? Saupoudrage ? Discours de circonstance pour coller à la demande sociale qui exigeait avec empressement une reddition des comptes ? Macky Sall y croyait-il véritablement ? La suite des événements laisse dubitatif !
Créé par la loi 2012-20 du 28 décembre 2012, l’OFNAC dispose en réalité des garanties nécessaires pour mener en toute indépendance sa mission de contrôle comme d’ailleurs, du moins sur papier, la plupart des autres organes de contrôle de l’Etat du Sénégal. Dans les lois, comme par les textes qui régissent le fonctionnement de l’OFNAC, l’organe pouvait jouer correctement et avec efficience sa mission de prévention et de lutte contre la fraude, la corruption, les pratiques assimilées et les infractions connexes.
Il avait aussi pour compétence, une première d’ailleurs, de recevoir les déclarations de patrimoine des personnes assujetties, conformément aux dispositions de la loi n° 2014-17 du 02 avril 2014 relative à la déclaration de patrimoine. L’OFNAC est un organe qui a rang de statut d’autorité administrative indépendante dotée de l’autonomie financière. Les enquêteurs ont la prérogative de diligenter des enquêtes et vérifications sur la base des réclamations, plaintes et dénonciations des citoyens relatives à des faits présumés de corruption, de fraude et de pratiques assimilées commis par toute personne exerçant une fonction publique ou privée. Si après enquêtes et vérifications sériées, les faits
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présumés sont avérés, l’OFNAC peut établir un dossier contre les délinquants présumés et le déposer directement entre les mains du Procureur de la République.
S’y ajoute que, pour assurer une plus grande liberté et indépendance, l’ensemble des membres de l’Assemblée générale de l’OFNAC bénéficient, dans l’exercice de leurs missions, de garanties bien encadrées par la loi 2012-30 du 28 décembre 2012. Parmi ces garanties, on note l’inviolabilité de leur mandat auquel il ne peut être mis fin avant terme, qu’en cas de démission, de décès, ou de faute lourde constatée par l’assemblée des membres ainsi que la protection pénale dans l’exercice de leurs missions vis-à-vis de la tutelle. En un mot, l’OFNAC est une structure capable d’abattre de manière efficace et efficiente un travail remarquable dans la lutte contre la corruption.
Pour diriger l’OFNAC, le Président Macky Sall avait jeté son dévolu sur Mme Nafy Ngom Keïta. La dame n’était pas en terrain inconnu. Première femme à accéder par voie de concours à ce corps d’élite l’Inspection générale d’Etat (IGE), première Vérificatrice générale d’Etat et première Présidente de l’OFNAC, elle est présentée comme une femme de challenge et de défi, mais également d’influence.
En réalité, les projecteurs ont été braqués sur Mme Nafy Ngom Keïta en 2005. Chef de mission de l’Inspection générale d’Etat, elle avait piloté ce que l’on
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a appelé « l’affaire des Chantiers de Thiès ». Un dossier politico-judiciaire qui avait abouti à l’emprisonnement de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck. Un dossier qui avait tenu en haleine tout un peuple avec des secrets jamais révélés. Et pour la première fois, mise sous pression avec des menaces de mort, Mme Nafy Ngom Keïta était sortie de son devoir de réserve exigé de tout membre de l’I G E. Dans une longue interview accordée au quotidien « Walfadjri », elle ne ménage pas Abdoulaye Diop, à l’époque tout puissant Ministre de l’Economie et des Finances : « On parle de décision de versement pour justifier les transferts de fonds à Thiès. Qu’est-ce que cela veut dire ? Une décision, c’est par essence un acte interne de gestion. C’est lui le Ministre des Finances qui a l’argent. Le problème, est qu’il y a quelqu’un qui a donné des instructions, un autre qui a été Premier ministre qui a une responsabilité et je n’entre pas dans les détails de comment il est responsable et ce qu’il a fait. Mais, apparemment, on veut sauver Abdoulaye Diop. Je ne me préoccupe pas des raisons mais qu’il me laisse tranquille, je ne lui ai rien fait »3 avait-elle confié aux journalistes. Une déclaration qui avait fait l’effet d’une bombe, car elle insinuait une approche sélective dans les mis en cause dans le fameux dossier des « Chantiers de Thiès ».
Après ce feuilleton politico-judiciaire, Mme Nafy Ngom Keïta sera nommée vérificatrice générale d’Etat (VGE) par le Président Abdoulaye Wade.
3. Interview dans le quotidien walfadjri le 22 septembre 2005
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Le Président Macky Sall connaît bien Mme Nafy Ngom Keïta pour avoir joué sa partition dans le dossier des « Chantiers de Thiès ». A l’époque Premier ministre, il s’était chargé, une fois le rapport des chantiers de Thiès déclassifié, de le rendre public au cours d’une rencontre avec les diplomates accrédités au Sénégal, pour mieux enfoncer Idrissa Seck et se faire une place au soleil. Une première dans l’histoire politique du Sénégal ! Et un fait d’armes dont on ne peut pas se glorifier !
A la tête de la Vérification générale, le mandat de 7 ans non renouvelable de Mme Nafy Ngom Keita avait expiré le 7 Juillet 2013. L’OFNAC existait depuis plus d’un an et n’avait pas de président. Le Président Macky Sall avait même proposé le poste à Me Mame Adama Gueye, premier Coordonnateur de l’ONG Forum civil. Mais ce dernier avait décliné l’offre. Le chef de l’Etat finira par porter son choix sur Mme Nafy Ngom Keita pour présider aux destinées de l’office. Elle est nommée par le décret n° 2013-1045 du 25 juillet 2013 présidente de l’OFNAC. L’inspecteur général d’Etat de classe exceptionnelle conduira les destinées de l’office pour une durée de trois ans, renouvelable une fois. Un défi ardu mais pas pour celle qui a initié des réformes majeures dans le corps d’élite de l’administration sénégalaise, l’Inspection générale d’Etat. Des réformes qui ont abouti à la création d’un poste de vérificateur général et d’un adjoint, à l’institution d’un mandat de 7 ans non renouvelable pour le vérificateur général, la
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Scandale au cœur de la République
publication d’un rapport annuel sur l’état de la gouvernance publique et de la reddition des comptes au Sénégal. Elle a également permis l’extension des domaines de compétences de l’Inspection générale d’Etat à l’évaluation des politiques publiques, à la vérification de l’optimisation des ressources et à l’audit supérieur. Mme Nafy Ngom Keita a été également la présidente du Forum des Inspections générales d’Etat d’Afrique (FIGE), avec comme mission de contribuer à « la prévention et la lutte contre la fraude, la corruption, les pratiques assimilées et les infractions connexes, en vue de promouvoir l’intégrité et la probité dans la gestion des affaires publiques. »
Bref Mme Ngom Keita n’était pas en terrain inconnu. Elle aura l’insigne honneur d’être la première présidente de l’OFNAC. Mais ce n’était pas du pain béni et n’attendra pas longtemps pour s’en rendre compte.
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2. Les déboires de l’OFNAC
« Quiconque est capable de mentir est indigne
d’être compté au nombre des hommes, et quiconque ne sait pas se taire est indigne de gouverner »

Les aventures de Télémaque,
fils d’Ulysse (édition 1841) Fénelon
Que vaut réellement la parole du Président Macky Sall ? Car, entre sa parole et l’acte concret, il existe souvent un fossé énorme. D’ailleurs ces détracteurs pensent que sa parole est « instable ». Rappelons que l’OFNAC a été créé par la Loi 2012-30 du 28 décembre 2012, ce n’est que 6 mois plus tard, le 25 juillet 2013, que le Président Macky Sall se décidera enfin à trouver à l’organe une présidente, en la personne de Mme Nafy Ngom Keita. L’OFNAC a été élevé au rang d’autorité administrative indépendante, dotée de l’autonomie financière. Mais, à l’instar d’ailleurs de bon nombre
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d’organes de contrôle, l’OFNAC démarrera difficilement ses activités à cause de la lenteur de la mise en place de son budget. Plus généralement les autorités ont tardé à doter la structure des moyens matériels, financiers et des ressources humaines nécessaires à son fonctionnement. A quelles fins ? Etait-ce un stratagème savamment planifié pour empêcher l’OFNAC d’aller à l’assaut de la corruption qui avait gangréné l’administration sénégalaise ?
En tout cas, cette situation avait fini par irriter le coordonnateur du Forum civil, Mouhamadou Mbodj qui se demandait finalement « ..Si l’OFNAC, en réalité n’est rien d’autre qu’un organe de contrôle de plus à la solde de l’Etat. » Devant ce spectacle désolant la présidente Mme Nafy Ngom Keïta avait fini par prendre son courage à deux mains.
Au cours d’un séminaire, interpellée par les journalistes sur la question elle déclara « Je suis très gênée pour parler de budget. Mais sachez que pour le moment, nous n’avons pas les moyens de fonctionner. Mais le Président qui a créé l’OFNAC et qui m’a fait l’honneur de me porter à la tête de cette organisation mettra en place les moyens qu’il faut pour son fonctionnement. »4 Un langage politiquement correct. En réalité la dame en avait marre de ne pas se mettre immédiatement au travail, à la hauteur de sa compétence 4. 26 novembre 2013 séminaire organisé par le Forum Civil sur « la corruption et la bonne gouvernance »
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Le dossier du COUD
et des pouvoirs de l’OFNAC. Mais cette sortie dans la presse avait scandalisé le Président Macky Sall qui décida d’appliquer la loi du talion et profitant d’une rencontre au King Fahd, il solda ses comptes en déclarant fermement « Je n’accepterai jamais que des problèmes devant se régler au niveau interne soient exposés sur la place publique »5. En fait cette réplique du chef de l’Etat n’était qu’une mise en scène. Car, sur sa table, se trouvaient deux mémorandums rédigés par Mme Nafy Ngom Keïta, qui lui expliquait dans les détails les difficultés de fonctionnement de l’OFNAC et qu’il avait fini de lire. Bref, cette forte médiatisation des travers de l’OFNAC a eu le mérite quand même d’avoir décanté la situation. Car, les autres membres furent nommés pour compléter l’Assemblée générale. Le Ministère de l’Economie et des Finances mettra dans un premier temps 100 millions de Francs CFA à la disposition de l’OFNAC avant de compléter à partir du 1er janvier 2014 les 400 millions restants. Soit un budget total de 500 millions de Francs CFA. L’OFNAC pouvait ainsi démarrer ses activités deux ans après sa création.
5. Réaction de Macky Sall le 16 décembre lors 2013 d’une rencontre au King Fahd
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3.L’OFNAC, une naissance aux forceps
« Trop gouverner est le plus grand danger
de nos gouvernants. » Collections — Mirabeau
L’équipe de Mme Nafy Ngom Keïta était composée de M. Ibrahima Faye, nommé par décret n° 20131365 du 17 octobre 2013 vice-président de l’OFNAC. Diplômé en psychologie, en droit, en philosophie et en gestion publique, il a été le chef de la division des enquêtes et investigations de l’Inspection générale d’Etat du Sénégal. Il fut également conseiller au Centre d’Orientation de Thiès de 1994 à 2000.
Les autres membres ont été nommés par le décret n° 2013-1644 du 31 décembre 2013. Il s’agissait d’Ibou Yogou Ndiaye, chef du département déclaration de patrimoine de l’OFNAC. Il avait la lourde tâche de rece
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Scandale au cœur de la République
voir les documents des assujettis et de leur vérification. Une obligation de déclaration de patrimoine qui fera grincer des dents. Mais, diplomate de carrière, ancien ambassadeur du Sénégal au Maroc de 2000 à 2010 et ancien Secrétaire général du Ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur de 2010 à 2012, il lui revenait d’user de tact pour relever le défi.
Le président du Comité de rapport public (COMRAP) était Amadou Niang. Diplômé de l’Ecole nationale d’administration et de la magistrature (ENAM), il a exercé les fonctions de chef de service régional du commerce puis chef de division de 1985 à 2000. Directeur du commerce intérieur de 2000 à 2009, il fut nommé Ministre du Commerce de 2009 à 2012. Au lendemain de la défaite de Wade en 2012, il a mis en veilleuse ses activités politiques.
La nomination qui a soulevé des vagues est celle du Pr El Hadj Niang, membre de « Macky 2012 », la coalition qui a soutenu le candidat Macky Sall au premier tour de la présidentielle 2012. Pour le Forum civil, cette nomination était de nature à provoquer des suspicions allant même jusqu’à dénaturer les missions de l’OFNAC. Titulaire de la chaire de radiologie et d’imagerie médicale, le Pr El Hadj Niang sera toutefois maintenu dans l’équipe.
Autre controverse, la nomination de l’ancien inspecteur général de la Police nationale, Codé Mbengue.
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Le dossier du COUD
A l’époque il avait été éclaboussé dans une affaire de drogue qui avait secoué la police. Finalement il sera blanchi.
La présidence du Comité d’éthique et de déontologie (COMED) et du Comité finance et de budget (COMFIB) revenait à Aissata Niang Ndiaye. Inspecteur principal du Trésor, elle a été Ministre déléguée auprès du Ministre de l’Economie et des Finances chargé du budget en 1998 dans le gouvernement du Premier ministre Mamadou Lamine Loum.
Amadou Diouf, plus connu sous le nom de Ama Codou Diouf est l’homme aux multiples casquettes. Expert en suivi, évolution et gestion de programme de développent communautaire, il est membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et du Conseil de régulation de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) du Sénégal. Amadou Diouf va hériter de la présidence du Comité de planification et de reddition des Comptes (COMPREC).
Aissata Sow Fall va présider le Comité de veille et d’alerte dans le secteur de la justice (COVAJ) au sein de l’OFNAC. Elle est issue de la magistrature et était juge d’instruction au tribunal de la première instance de Thiès de 1978 à 1984.
Jouissant d’une bonne réputation auprès de ses pairs, avocat de profession, Me Abdou Kane, qui était déjà
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coopté dans le collectif des avocats de l’Etat chargés du recouvrement des biens mal acquis, sera le président du Comité de recouvrements des avoirs dérobés (CORA).
Ingénieur diplômé de l’Ecole polytechnique féminine de Sceaux ainsi que de l’Ecole supérieure aéronautique de l’Université d’ORSOY à Paris, Aminata Diallo, qui a accumulé 37 ans d’expérience, va présider le Comité de formation et de renforcement des capacités (COMFOR).
Le colonel Mactar Sow sera la cheville ouvrière de l’OFNAC. Doté d’une riche expérience en matière d’enquête et d’investigations pour avoir dirigé la Section de recherches à compétence nationale de la gendarmerie de 2001 à 2005 et la gendarmerie territoriale de 2009 à 2012, il sera le chef du département Enquêtes et Investigations de l’OFNAC.
La prestation de serment de ces 12 membres de l’OFNAC va se tenir à la cour d’appel de Dakar le 26 mars 2014. Ils vont être officiellement installés lors d’une cérémonie tenue au Palais de la République présidée par le chef de l’Etat le 27 mars 2014.
Désormais, il revenait à cette équipe sous la houlette de Mme Nafy Ngom Keïta de combattre la corruption. Ce fléau que le Président Macky Sall qualifiait « de phénomène insidieux et pernicieux qui freine notre marche vers le progrès. Il ajoutait : « la corruption porte atteinte à la morale, à la bonne conduite des affaires publiques et à l’Etat de droit ». Y croyait-il vraiment?
Fin de la première partie

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